Electrosmog.be
Pollution électromagnétique par les micro-ondes et autres
Limites de protection des champs électromagnétiques
Mars 2024, dernière mise à jour le 27 septembre 2024
- CE: champ électrique en V/m (volt/mètre).
- CM: champ magnétique en µT (microtesla, millionième de Tesla). La recommandation de l’ICNIRP[1] était de 100 µT jusqu’en 2010, laquelle est restée celle de l’UE.[2]
- EBF: extrême basse fréquence (autour de 50 Hz. 50 Hz est la fréquence du courant électrique domestique qui donne lieu à des CE et des CM émis à 50 Hz et plus).
- CEM-RFou RRF : champs électromagnétiques de radiofréquence ou rayonnements de radiofréquence (de 3 kHz à 300 GHz), en W/m² (densité de puissance de l’onde, watt/m²) ou en V/m (intensité du champ électrique de l’onde, volt/m).[3]
4 500 000 µW/m² (microwatt/m² ou 4,5 W/m²) est la limite de l’ICNIRP (« valeur de référence ») pour le grand public pour une onde dont la fréquence est de 900 MHz (mégahertz).
4,5 W/m² équivaut à 41 V/m (volt/mètre) pour l’intensité du champ électrique de l’onde.
Entre 2 et 300 GHz, cette limite est de 10 W/m² (61 V/m).
En milieu professionnel, ces limites de l’ICNIRP sont multipliées par 5. Par exemple, 50 W/m² (137,3 V/m) à 3,5 GHz, la bande « cœur »[4] de la 5G dans l’UE.
Champs électromagnétiques de radiofréquence (CEM-RF)
Les normes de l’ICNIRP sont appliquées par la majorité des pays de l’UE et de nombreux autres pays. Comme la Belgique, quelques pays de l’UE ont choisi des valeurs limites légèrement inférieures. Aux États-Unis les limites sont établies par la FCC (Federal Communications Commission). Elles sont similaires à celles promues par l’ICNIRP, les deux institutions s’appuyant sur des études comportementales simplistes datant des années 1980 et menées sur 8 rats mâles et 5 singes mâles exposés à des CEM-RF pendant moins d’une heure, le seul critère étant l’augmentation de la température corporelle.[5]
Les recommandations des experts indépendants sont notablement plus basses, environ 1 million de fois moins que la valeur de référence de l’ICNIRP pour les CEM-RF à 900 MHz et environ 2 millions de fois moins à la fréquence de 3,5 GHz, la bande « cœur » de la 5G en cours de déploiement dans l’UE.
On note que même le Conseil de l’Europe préconise une limite plus basse que l’ICNIRP : 0,2 V/m (106 µW/m²) soit 40 000 fois moins que la valeur de référence de l’ICNIRP à 900 MHz (Résolution 1815 de 2011).
Les rayonnements naturels de CEM-RF ne sont ni modulés, ni pulsés, ni polarisés tout en étant d’un niveau d’intensité infiniment plus faible, par exemple, à la fréquence de 1 GHz, de l’ordre de 1 trillion de fois[6].
Les principaux groupes d’experts indépendants sont :
- BioInitiative (electrosmog.be/RBI) ;
- EUROPAEM (Académie européenne de médecine environnementale, europaem.eu) ;
- Institut für Baubiologie (baubiologie.de) ;
- ICBE-EMF (International Commission on the Biological Effects of Electromagnetic Fields, icbe-emf.org).
Leurs recommandations diffèrent légèrement et, pour certaines, varient selon le contexte (enfants, personnes fragilisées, chambre à coucher, etc.).
Les limites de protection dans les trois Régions de Belgique
En Belgique, les seuils sont très proches de ceux de l’ICNIRP. De nouveaux textes de loi ont été votés en 2022 et 2023 dans les trois Régions pour augmenter les valeurs limites de protection des CEM-RF, au profit du déploiement de la 5G :
- Région de Wallonie : augmentation d’un facteur 10 (décret du 16 décembre 2022)[7].
La limite cumulative est maintenant de 18,4 V/m (900 000 µW/m²) à 900 MHz.- Région de Bruxelles : augmentation d’un facteur 6 (ordonnance du 4 avril 2023)[8].
La limite cumulative est maintenant de 14,6 V/m (570 000 µW/m²) à 900 MHz.- Région de Flandre (arrêté du 10 juin 2022) :
La limite cumulative est de 20,6 V/m (1 125 623 µW/m²) à 900 MHz.
Ces nouveaux textes de loi n’ont par ailleurs pas apporté de réponses aux manquements des textes antérieurs. Par exemple en Région de Wallonie :
- La limite de protection ne concerne que les émissions des antennes du réseau de téléphonie mobile public et aucunement les nombreuses autres antennes (radiodiffusion, télévision, radioamateurs, SNCB, services de secours, radars, armée, etc.)
- La limite ne vaut que pour l’intérieur des locaux d’habitation et de travail : il n’y a pas de limite pour l’extérieur, en rue, aux balcons, en forêt, en rase campagne, dans les transports, en commun ou non,… Le décret mentionne quelques rares exceptions : jardins, parcs, cours de récréation…
- Pas de prise en compte systématique de l’effet cumulatif de sites d’antennes qui seraient proches les uns des autres (se fait sur base d’un « périmètre de proximité » arbitraire calculé par l’ISSeP).
- Le décret ne prévoit pas la mise en place de zones blanches exemptes de radiations électromagnétiques, un besoin pour tous et une nécessité impérative pour les personnes électrohypersensibles qui représentent environ 5 % de la population[9].
- La protection de la faune et la flore est toujours manquante bien qu’il soit de plus en plus évident que la chute dramatique des populations et la disparition de certaines espèces, les insectes en particulier, soient liées à la pollution par les radiations de la téléphonie mobile.
Notons encore que le Conseil supérieur de la santé (CSS) recommande 3 V/m (23 873 µW/m²) soit environ 200 fois moins que la valeur de référence de l’ICNIRP à 900 MHz.[10]
Des recours en annulation ont été déposés par le Collectif stop5G.be (www.stop5g.be), pour les Régions de Wallonie et de Bruxelles.
___
[1]ICNIRP : Commission internationale sur la protection des radiations non ionisantes (International Commission on Non-Ionizing Radiation), une institution privée de droit allemand, qui établit les recommandations pour l’OMS. Pour les RRF, les limites d’exposition recommandées pour le grand public varient de 2 à 10 W/m² (de 27 à 61 V/m) selon la fréquence. Ces limites de RRF de l’ICNIRP correspondent à des mesures moyennées sur 30 minutes, ce qui efface les pics instantanés d’une onde qui peuvent être jusqu’à 1000 fois plus puissants que la valeur moyenne pour une antenne 5G – 25 fois pour une antenne 2G, 3G ou 4G.
Comme pour la FCC (Federal Communications Commission, USA), le credo de l’ICNIRP est que toute atteinte à la santé par les CEM-RF ne peut résulter que d’un effet thermique. En conséquence, les seuils de protection ne sont établis que pour limiter l’échauffement des tissus, sans prendre en considération tout autre effet (non thermique).
[2]https://www.bfs.de/EN/topics/emf/expansion-grid/protection/limit-values-europes/limit-values-europe_node.html et https://www.emfs.info/limits/limits-organisations/icnirp-1998
[3] La relation entre intensité du champ électrique (IE, en V/m) et densité de puissance (DP, en W/m²) :
DP = IE2 / 377
[4] Bande de 3,5 GHz : de 3,4 à 3,8 GHz.
[5]Scientific evidence invalidates health assumptions underlying the FCC and ICNIRP exposure limit determinations for radiofrequency radiation: implications for 5G. ICBE-EMF, 2022. https://doi.org/10.1186/s12940-022-00900-9
[6] Évolution de la pollution électromagnétique par les CEM-RF : electrosmog.be/evolution-CEM-RF
[7] Le 21 avril 2022, le ministre-président de Wallonie, Elio Di Rupo, émettait un communiqué de presse dans lequel il nous faisait part de son projet de faire passer la limite de protection contre les CEM-RF de 3 V/m (par antenne/technique et opérateur) à « 9,2 V/m (à 900 MHz) par opérateur ». Un projet transformé en un décret en décembre 2022.
Concrètement, ce décret permet à tout opérateur de mettre en place un nouveau site avec une antenne 5G émettant avec une puissance presque 10 fois supérieure par rapport ce que lui aurait permis l’ancienne norme. Précisément, avec une intensité de 9,2 V/m (224 509 µW/m²) au lieu de 3 V/m (23 873 µW/m²) – soit avec exactement 9,4 fois plus de puissance.
[8] Auparavant la limite était de 6 V/m (95 500 µW/m²). Avant 2014, elle était de 3 V/m (24 000 µW/m²) ce qui veut dire que, en Région de Bruxelles, entre 2014 et 2023, la limite a été augmentée de 24 fois.
[9] À propos de la prévalence de l’électrohypersensibilité, voir electrosmog.be/#ANSES-EHS
[10] Dans son avis 8519 de février 2009, le Conseil supérieur de la santé (CSS, www.health.belgium.be) recommande une norme de 3 V/m : « le CSS rappelle qu’il est d’avis que le principe de précaution a lieu d’être appliqué, vu les incertitudes scientifiques, pour protéger la population et insiste sur sa recommandation d’une norme à 3 V/m » (page 1).
Dans cet avis, le CCS justifie sa recommandation en invoquant le principe de précaution, « par suite de l’ignorance et de l’incertitude quant aux effets biologiques, éventuellement pathogènes, à long voire très long terme d’une exposition de niveau relativement faible », en particulier eu égard aux enfants, aux personnes âgées et à toutes les personnes fragilisées (toute personne qui n’est pas un adulte en bonne santé).
Dans son avis 8356 de juillet 2010, le CSS persiste : « Concernant les radiofréquences et les micro-ondes d’autre part, des effets sur la santé à long terme ne sont pas exclus à ce jour pour des niveaux d’exposition typiques de ceux de téléphones mobiles…Tenant compte des incertitudes et considérant cette fois l’exposition à proximité d’antennes émettrices, le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) a proposé dans son avis d’octobre 2000 (CSH 6605, 2000) que l’exposition prolongée de la population générale ne génère pas un SAR de plus de 0,0004 W/kg (corps entier, équivalant à une exposition de 3 V/m à 900 MHz), soit 200 fois inférieures à celle de l’OMS (0,08 W/kg, équivalant à 42 V/m à 900 MHz) (CSS 8519, 2009) ».
Le CSS confirme dans son avis 8927 d’octobre 2014 : « Le CSS estime dès lors que ses recommandations antérieures sont toujours d’application, y compris les limites d’exposition recommandées pour la santé. Il considère l’application du principe de précaution dans ce contexte comme un moyen de prévenir des dommages irréparables pour la santé publique ».